« Ne préfères-tu pas, ô 'Abdallâh, que Dieu te remplace ta demeure par une autre au paradis. »
[ Parole du Prophète Muhammad, voir La vie des compagnons de Yusuf AI-Qandahlawi, Dar al-Qalam, Damas.]

 

Cet illustre compagnon était un proche parent du Messager de Dieu . C'était son cousin maternel et son beau-frère. Il avait embrassé très tôt l'islam, bien avant que le Prophète n'utilise la demeure d'Al-Arqam pour tenir des réunions.

Il fut aussi l'un des premiers à partir en Abyssinie pour échapper aux persécutions des païens qurayshites.

Toute sa famille convertie l'accompagna. Ils laissèrent tout. Demeures, terres, biens, etc.

 

Un jour, dit-on, les dignitaires de Quraysh étaient en train de se promener dans les rues de la Mecque, lorsqu'ils arrivèrent devant les demeures de la famille des Banû Jahsh. Il n'y avait pas âme qui vive. Tout était désert et seul le vent faisait claquer les portes et les fenêtres. Arrivé devant la maison de 'Abdallâh Ibn Jahsh , l'une des plus belles parmi les demeures des Banû Jahsh, Abû Jahl avoua son intention de l'acquérir, et on rapporte qu'il s'y comporta comme si c'était sa propre maison. Lorsque la nouvelle lui parvint, 'Abdallâh Ibn Jahsh devint triste et malheureux.

Le voyant dans cet état, le Messager de Dieu lui dit :

« Ne préfères-tu pas, ô 'Abdallah, que Dieu te remplace ta demeure par une autre au Paradis ? »
 

À ces mots, notre pieux compagnon surmonta sa tristesse et retrouva sa sérénité. Et la vie continua pour 'Abdallâh et ses frères émigrés dans l'attente du retour auprès du Messager de Dieu pour vivre leur foi dans leur patrie sans crainte ni exactions.

 

Et le jour tant attendu arriva. Les émigrants quittèrent leur terre d'asile pour venir s'installer à Médineune nouvelle vie commença pour eux. Notre pieux compagnon fut au comble de la joie en retrouvant le bien-aimé Prophète et ses compagnons à Médine. Les retrouvailles furent émouvantes.

'Abdallâh vivait là le plus beau jour de sa vie. Il aurait aimé ne plus quitter le Messager de Dieu et jouir de sa présence, mais hélas les ennemis de l'islam étaient là, menaçants, et il fallait être vigilants et mobilisés à tout moment pour contrecarrer leurs plans.

En effet, quelque temps après leur installation à Médine, le Messager de Dieu envoya un groupe de musulmans en mission de reconnaissance. Il donna le commandement à 'Abdallâh avec les instructions suivantes :

« Allez jusqu'à An-Nakhla — entre la Mecque et Médine —
et surveillez les mouvements des qurayshites et leurs intentions. »

Les huit compagnons partirent en mission sous le commandement de notre illustre 'Abdallah Ibn Jahsh qui fut ainsi le premier compagnon à assumer cette responsabilité.

Après deux jours de marche, ils arrivèrent à l'endroit choisi et s'installèrent loin des regards pour surveiller les mouvements des qurayshites.

Tout à coup, ils virent une caravane s'approcher escortée par quatre hommes de Quraysh. Cette caravane ramenait des peaux, du raisin sec et d'autres produits que les qurayshites avaient l'habitude d'échanger.

Étant au dernier jour des mois sacrés, les compagnons se concertèrent sur l'éventualité d'une attaque de la caravane.

Ils se dirent : « Si nous les attaquons aujourd'hui, nous violerions alors la sacralité de ce jour et tous les Arabes nous en tiendront rigueur.

Or, si nous les laissons partir, ils parviendront aux territoires sacrés et ils nous échapperont. »

Après plusieurs conciliabules, ils tombèrent d'accord pour attaquer la caravane. Quelques moments après, ils firent un mort, deux prisonniers, tandis que le quatrième païen put s'échapper. Et c'est muni du butin de la caravane et de leurs deux prisonniers qu'ils firent leur entrée à Médine, croyant avoir bien fait.

 Or, en apprenant la nouvelle, le Messager de Dieu fut mécontent de l'initiative prise par ses compagnons et le leur montra. Il les apostropha en ces termes :

« Par Dieu, je ne vous ai jamais ordonné de combattre.
Je vous ai seulement recommandé de surveiller les mouvements de Quraysh et ses intentions. »
 

Ensuite, il ordonna à ses compagnons de bien traiter les deux prisonniers en attendant d'étudier leur cas et il refusa de toucher aux produits de la caravane. Les huit compagnons comprirent alors que le Prophète était en colère contre eux. Ils en ressentirent une grande peine, qui plus est en voyant tous les musulmans leur reprocher leur désobéissance aux ordres du Prophète.

Leur chagrin était d'autant plus immense que les qurayshites avaient pris prétexte de cet événement pour accuser le Messager de Dieu d'avoir violé les mois sacrés.

C'est dire combien était immense la honte de ces pieux hommes parmi lesquels il y avait d'illustres noms comme Sa`d Ibn Abî Waqqâs et 'Abdallah Ibn Jahsh . Cette situation dura ainsi jusqu'à ce que la Révélation vint mettre un terme à leur calvaire et les délivrer de leur poids.

En effet, le Messager de Dieu annonça à ses compagnons l'heureuse nouvelle en leur disant que ce qu'ils avaient fait n'est rien en comparaison de ce que font les païens.

 « Ils l'interrogeront sur le fait de faire la guerre pendant les mois sacrés. Dis : "Y combattre est un péché grave, mais plus grave encore auprès de Dieu est de faire obstacle au sentier de Dieu, d'être impie envers celui-ci et la
Mosquée sacrée, et d'expulser de là ses habitants. L'association est plus grave que le meurtre" [...] »
[ Sourate 2 - Verset 217 ]

 

Ces versets furent une véritable délivrance pour 'Abdallah et ses compagnons, de même que pour le Messager de Dieu qui ne savait plus comment traiter des gens qui, croyant bien faire, ont désobéi à ses ordres.

Les huit fautifs furent dès lors chaleureusement félicités par leurs compagnons et leur acte ne sera plus considéré comme une désobéissance.

Lorsque le jour de la bataille de Badr arriva, 'Abdallah se distingua par sa grande bravoure et son engagement. Il lutta énergiquement jusqu'à ce que la victoire fût certaine.

Alors, auréolé de gloire et de prestige, il retourna avec ses frères à Médine où les attendaient d'autres épreuves et d'autres défis. En effet, les musulmans n'eurent pas le temps de se reposer et de penser à autre chose que déjà les qurayshites leur donnaient rendez-vous à Uhud. 

Ce jour-là aussi, notre pieux compagnon fit preuve d'une bravoure à la mesure de sa foi et, suprême consécration, il fera partie du cortège des martyrs. 

Mais laissons le soin à son compagnon Sa'd Ibn Abî Waqqâs nous raconter ce que fit celui-ci en ce jour mémorable :

« Le jour de Uhud, 'Abdallah Ibn Jahsh me dit :
"N'invoques-tu pas Dieu, toi ?"   
– "Si, ai-je répondu."

Nous nous sommes isolés alors dans un coin où j'ai invoqué Dieu en ces termes :

"Ô Mon Dieu, lorsque je serai en face de l'ennemi, envoie-moi quelqu'un de dur
et de féroce pour me combattre et fais en sorte que je le mette hors d'état de nuire."
 

Quant à 'Abdallah Ibn Jahsh , il fit cette prière :

"Ô Mon Dieu, envoie-moi quelqu'un de dur et de féroce pour me combattre
et fais en sorte qu'il me coupe le nez et les oreilles. Ainsi lorsque je te rencontrerai et que tu me diras :
" Pour quelle raison on t'a coupé le nez et les oreilles ? "  Je te dirai : 'Pour Ta cause et celle de Ton Messager .
Et Toi, tu me diras : " Tu dis vrai. " »
 

Sa`d ajouta :

« La prière de 'Abdallah Ibn Jahsh était préférable à la mienne car elle fut exaucée par Dieu. À la fin de la journée, je le vis étendu sur le champ de bataille, le corps mutilé.
Son nez et ses oreilles étaient attachés à un fil et suspendu à un arbre. »
 

Ainsi mourut cet illustre compagnon.

Le Messager de Dieu l'enterra dans la même tombe que son oncle Hamza en versant sur eux ses larmes. 

Que Dieu soit satisfait de ce pieux compagnon !

 
 

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