« Mon Dieu, instruis-le dans les choses de la
Religion et apprends-lui les subtilités de l’interprétation. » [
Parole du Prophète Muhammad,
rapportée par Ibn Abî Sayba dans le Musannaf ]
On
l’appelait « khabr al-umma », le docte de la communauté, en raison de ses larges
connaissances en matière de religion, et de sa sagesse. Il disait lui-même: « Il
n’y a pas d’oiseau qui s’envole sans que nous ne trouvions cela dans le Livre d'Allah
». Mais pourquoi s’étonner de ce don attribué à cet illustre compagnon
lorsqu’on sait que le Messager d'Allah a invoqué pour lui, Allah en ces termes
«Mon Dieu, instruis-le dans les choses de la religion et apprends-lui les
subtilités de l’interprétation. »
Pourtant, Ibn ‘Abbâs , puisque c’est de
lui qu’il s’agit, n’a pas vécu longtemps avec le Messager d'Allah . Cousin du
Prophète, et plus jeune que lui de beaucoup d’années en ce sens qu’à la mort du
Messager d'Allah, il n’avait que 13 ans, cela ne l’a pas empêché, néanmoins,
de fréquenter assidûment les cercles d’enseignement du Messager d'Allah et
d’assimiler tout ce qu’il entendait comme science et connaissance. Son
intelligence aigüe et sa mémoire prodigieuse lui permettaient d’acquérir avec
une grande facilité les connaissances reçues et de les mémoriser rigoureusement.
Mais c’est grâce à l’invocation du Prophète que notre illustre compagnon
avait acquis cette place privilégiée au sein de la communauté. Après la mort du
Messager d'Allah , notre pieux compagnon, qui avait adjoint à sa quête de la
science une grande piété et un total détachement des plaisirs de ce monde, se
tourna alors vers les compagnons les plus anciens et surtout les plus érudits.
C’est ainsi qu’il passa toute sa jeunesse à aller d’un compagnon à un autre, en
récoltant tout ce qu’il pouvait comme paroles du Messager d'Allah et comme
sagesse.
Il disait lui-même:
«
Lorsque j’entendais parler d’un compagnon
qui avait la connaissance du hadith, je me dépêchais chez lui pendant la sieste
de midi, m’asseyais devant sa porte et restais là jusqu’à son réveil. Lorsque
celui-ci sortait et me voyait, il me disait: “O cousin du Messager Pourquoi
t’es-tu dérangé ? Tu aurais pu m’appeler et je serais venu chez toi?’ Mais je
répondais : “Non, c’est à moi de venir chez toi. « Je l’interrogeais alors sur
le hadith que je voulais connaître et il me le transmettait. »
Mais il
ne faut pas penser que notre illustre compagnon
ne faisait que répéter ce qu’il
entendait de la part des compagnons. Celui-ci ne se contentait pas de ce travail
de transmission, somme toute noble. Grâce au don du Seigneur, il était passé
maître dans la science de l’interprétation du Saint Coran. Toute la communauté
lui est redevable de son immense savoir en ce domaine. L’illustre compagnon,
Sa’d Ibn Abî Waqqâ , a dit de lui
:
« Je n’ai jamais vu quelqu’un de plus
intelligent, de plus sage, de plus savant et de plus magnanime qu’Ibn ‘Abbâs.
J’ai vu à plusieurs reprises ‘Umar le consulter dans des problèmes épineux,
alors qu'autour de lui, il y avait les hommes de Badr parmi les Muhâjirîn et les
Ansars. Ibn ‘Abbâs donnait ses jugements et ‘Umar ne le remettait jamais en
cause... »
C’est dire l’autorité qu’avait cet illustre compagnon en
matière de science religieuse. Sa sagesse n’était pas des moindres puisque
chacun lui reconnaissait cette qualité innée. ‘Umar le surnommait « le jeune
homme qui ne fréquentait que les vieux ».
Dès son plus jeune âge, en effet,
Ibn ‘Abbâs
n’avait d’occupation et de distraction que dans la fréquentation des
vénérables compagnons dont il s’abreuvait de la science et de la sagesse qu’ils
ont eux-mêmes acquis auprès du Messager d'Allah . Prédestiné déjà par les
multiples invocations du Prophète en sa faveur à tenir ce rôle éminent,
notre pieux compagnon consacra toutes ses capacités et tout son temps pour
atteindre cette position.
On lui demanda un jour «D’où tiens-tu toutes ces
connaissances ? » Il répondit : « Par une langue qui questionne sans cesse et un
coeur qui enregistre scrupuleusement. »
Une fois parvenu à maturité, Ibn
‘Abbâs devint une véritable autorité parmi ses contemporains. On rapporte que sa
maison ne désemplissait jamais des disciples et des élèves qui venaient en
nombre pour assister à ses cours dans différentes disciplines.
Il était passé
maître dans les sciences du fiqh (jurisprudence), de la théologie, du hadith, de
l'interprétation du Coran, l’histoire des religions, la grammaire, et tant
d’autres disciplines intellectuelles et spirituelles. A chaque question,
il avait une réponse, et à chaque problème, une solution. Son sens de la
réplique et de la polémique vis-à-vis des adversaires était tranchant et
redoutable.
Il le prouvera lors de la fameuse polémique qu’il soutiendra face
aux adeptes de la secte Kharijite qui quittèrent les rangs de l’imam ‘Ali après
la bataille de Siffîn et le traitèrent, lui et ses partisans, d’apostats, pour
avoir accepté l’arbitrage des hommes.
Il est vrai que la propagande distillée
par les Kharijites commençait à prendre de l’ampleur surtout parmi les musulmans
nouvellement convertis. C’est pourquoi ‘Ali chargea
Ibn ‘Abbâs d’aller
débattre avec eux sur le plan théologique et infirmer leurs arguments un par un.
Ibn ‘Abbâs alla à leur rencontre et leur dit:
«Que reprochez-vous à ‘Ali ?»
Ils lui répondirent : «
Nous lui reprochons 3 choses : la première,
c’est d’avoir substitué à l’arbitrage d'Allah , celui des hommes, alors qu'Allah
dit : { Le jugement n’appartient qu’à Allah
! } La deuxième, c’est d’avoir
combattu ses adversaires sans faire parmi eux de prisonniers de guerre, ni leur
prendre de butin. S’ils étaient des incroyants, leurs biens lui seraient
licites, et s’ils étaient des croyants, ils lui seraient illicites. La
troisième, c’est d’avoir accepté, durant l’arbitrage, de se désister du titre
d’émir des croyants comme concession à ses adversaires; Si donc il n’est pas
l’émir des croyants, il est nécessairement l’émir des incroyants »
Ces
arguments aussi fallacieux que pernicieux, une fois exposés, Ibn ‘Abbâs se mit à
les démonter un par un, avec ses vastes connaissances en théologie et son sens
de la réplique dont il avait le secret. II leur dit :
« Concernant le premier
reproche que vous lui faites d’avoir substitué à l’arbitrage d'Allah celui des
hommes, quel mal y a-t-il à cela alors qu'Allah dit:
{ O les croyants ! Ne tuez
pas de gibier alors que vous êtes en état de sacralisation. Quiconque parmi vous
en tue délibérément, qu’il compense alors, soit par quelque bête de troupeau,
semblable à ce qu’il a tué, d’après le jugement de deux personnes intègres parmi
vous ? } [
Sourate 5 - Verset 94 ]
Ces contre arguments tranchants et décisifs
stupéfièrent les polémistes Kharijites qui ne surent quoi répondre. En vérité,
les réponses d’Ibn ‘Abbâs les désarçonnèrent par leur clarté et leur conviction.
Des centaines d’entre eux firent amende honorable et revinrent de leur
égarement.
Depuis que la discorde prit racine au sein de la communauté
et provoqua des déchirements parmi les musulmans, notre pieux compagnon
ne cessa
de jouer le rôle de conciliateur et en voulant préserver coûte que coûte le sang
des musulmans. Il avait pris certes le parti de ‘Ali
sachant que ce dernier
était plus à même de mériter le califat, mais il fit tout son possible pour que
cette discorde ne se transforme pas en conflit fratricide.
Les bons
rapports qu’il entretenait avec ‘Ali et Mu’âwiya
lui permirent de jouer les bons
offices entre les deux protagonistes, en vain, hélas. Et lorsque Al-Husayn
voulut partir à son tour, en Irak, pour combattre Yazîd, Ibn ‘Abbâs
fit tout son
possible pour le retenir et le dissuader de partir.
En apprenant peu après le
martyr du petit-fils du Prophète , il entra dans un grand chagrin et se
retira chez lui. Il continua néanmoins à enseigner et à semer autour de lui la
science et la sagesse jusqu’à ce que son Seigneur l’appelât auprès de Lui. Il
avait alors 71 ans. Sa dépouille fut ensevelie dans la terre de
Tâ’if.
Qu’Allah
lui accorde Sa
miséricorde.

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