« Les anges se sont approchés une nuit de Usayd Ibn Hudayr pour entendre sa voix réciter le Coran. »
[ Parole du Prophète Muhammad , rapportée par Bukhârî.]

 

Lorsque Usayd Ibn Hudayr entendit pour la première fois parler du Prophète et de l'islam, il leur voua une hostilité déclarée. Il faut dire que depuis sa venue à Médine et son installation dans la demeure de Asâd Ibn Zurâra, un des nobles de la tribu des Khazraj, Mus'ab Ibn 'Umayr, l'envoyé du Messager de Dieu , ne cessait d'éclairer les gens sur la Révélation. Ceux qui venaient l'écouter étaient subjugués par la clarté de son verbe, le poids de ses arguments, et surtout la beauté qui émanait de la récitation du Coran. Et la liste de ceux qui se convertirent à l'islam s'allongea, touchant toutes les couches de la société médinoise.

Quand à Usayd, il ne cessait de pester contre la venue de cet étranger qui était en train de dénigrer les idoles de son peuple et de prêcher une autre religion. Un jour, Sa`d Ibn Mu`âdh , qui était encore païen, dit à son ami Usayd :

« Ô Usayd ! Tu vois ce jeune mecquois qui est venu obnubiler les pauvres d'entre nous et blasphémer nos divinités ? Trouves-le et obliges-le à quitter notre ville et à ne plus y revenir. »
 

Il ajouta ensuite :

« À l'intérieur de la demeure de mon cousin Ibn Zurâra, un des premiers ansarî, Mus'ab Ibn 'Umayr prêchait les enseignements de l'islam. Usayd vit beaucoup de gens qui écoutaient avec attention les paroles de Mus'ab. Son entrée brutale et son air enragé attirèrent l'attention de l'assistance qui se tourna vers lui. Nullement troublé par cette soudaine intrusion, Mus 'ab lui dit : " Pourquoi ne pas t'asseoir avec nous et écouter ! Si le discours te plaît, tant mieux. Sinon, tu n'auras rien perdu et nous t'épargnerons ce que tu répugnes d'entendre..." Usayd lui répondit : "Tu dis vrai." Et il s'assit par terre en posant sa lance sur ses genoux. Mus'ab se mit alors à lui exposer les préceptes de l'islam, et au fur à mesure qu'il lui récitait des versets du Coran, Usayd changeait de comportement. Il n'était plus le même homme hostile à l'air menaçant. La grâce de Dieu venait de toucher son coeur. Il s'adressa à Mus 'ab et lui dit : "Que ces paroles sont belles et touchantes ! Que faut-il pour entrer dans l'islam ?" Mus'ab lui répondit : "Tu te laves et tu purifies tes habits, ensuite tu témoignes qu'il n'y a de dieu que Dieu et que Muhammad est Son Envoyé, et tu fais une prière de deux génuflexions..."
 

Aussitôt dit, aussitôt fait. Usayd se leva, se rendit à un puits où il se purifia et proclama l'unicité de Dieu et la mission de Muhammad .

 Une page venait d'être tournée dans sa vie. L'idolâtrie, l'ignorance et les plaisirs de ce bas monde ne seront plus qu'un mauvais souvenir. Sa vie sera désormais empreinte de foi, de piété et de bonnes actions au service de Dieu. Déjà, on le surnommait le « parfait » pour sa noblesse d'origine et sa vive intelligence. En plus de son habileté dans le tir à l'arc qui faisait sa renommée, il était un brillant lettré, ce qui était très rare en ces temps.

 

La conversion d'Usayd entraîna celle de Sa`d Ibn Mu`âdh et d'un grand nombre de gens de Yathrib, notamment ceux des 'Aws, la tribu de nos deux illustres compagnons. Dès lors, Yathrib sera bien la ville de l'émigration qui accueillera le Messager de Dieu et ses compagnons.

 

Il aimait le Saint Coran et en avait fait sa passion dans la vie. Depuis qu'il l'avait entendu de la bouche de Mus `ab, il n'a cessé de s'en imprégner en consacrant le plus clair de son temps à son apprentissage. S'il n'était pas sur son cheval en train de combattre, il était forcément occupé à lire et à réciter le Coran. Sa voix douce et mélodieuse enchantait et subjuguait tous ceux qui l'écoutaient. Les compagnons aimaient écouter sa récitation. À chaque fois qu'il se mettait à lire le Coran, les compagnons se bousculaient à sa porte pour l'écouter. Et il n'y a pas que les humains qui furent subjugués par sa récitation du Coran...

 

Un jour, rapporte-t-on, notre pieux compagnon sortit par une belle nuit étoilée dans son jardin avec son fils et s'installa dans un coin où il se mit à réciter les premiers versets du Coran. Tout à coup, sa monture attachée près de lui se mit à s'agiter à tel point qu'elle faillit détacher ses liens. Surpris, Usayd s'arrêta et la monture se calma aussitôt. Il reprit sa récitation et la monture s'agita de nouveau et plus bruyamment encore. Il s'arrêta et elle se calma. Le manège dura quelques instants jusqu'à ce qu'Usayd eût peur que la monture ne piétine son fils endormi à ses côtés. Il s'apprêtait à le réveiller lorsque son attention fut attirée par une lumière éblouissante qui venait du ciel. Il leva la tête et vit une chose extraordinaire. Un nuage, en forme d'ombrelle avec des lampes lumineuses tout autour, était suspendu au-dessus de sa tête. De ce nuage irradiait une lumière vive et éblouissante qui illumina tout le ciel. Il s'éleva vers le ciel à une vitesse vertigineuse jusqu'à disparaître complètement. Le lendemain matin, Usayd alla trouver le Prophète et lui rapporta l'histoire. Le Messager de Dieu lui dit alors :

« Ce sont les anges qui venaient t'écouter ô Usayd. Et si tu n'avais pas mis un terme à la récitation, ils seraient restés avec toi sans se cacher des gens... »
 

 Cet illustre compagnon avait aussi un grand amour pour le Messager de Dieu . Il l'aimait à tel point qu'il souhaita que son corps touchât le corps béni du Prophète. C'est ainsi qu'il imagina une astuce pour concrétiser son désir.

 Un jour, alors que le Messager de Dieu était avec ses compagnons, Usayd se mit à raconter des anecdotes qui amusèrent l'assistance. Le Prophète, amusé, le piqua dans le dos avec sa main. Usayd lui dit : « Tu m'as fait mal, ô Messager de Dieu. » L'Envoyé de Dieu lui répondit: « Rends-moi la pareille, ô Usayd .» Celui-ci rétorqua : « Tu portes une chemise ô envoyé de Dieu ! Tandis que moi, j'étais torse nu lorsque tu m'as frappé.» Le Messager de Dieu releva alors sa chemise pour permettre à son illustre compagnon de lui rendre la pareille, mais stupeur, ce dernier, au lieu de le frapper, l'entoura de ses bras et l'embrassa sur sa poitrine en lui disant :

« Je te sacrifierais ma mère et mon père ô Messager de Dieu! Mais c'est un désir que j'avais depuis que je t'ai rencontré et maintenant je viens de le réaliser. »

 

Notre illustre compagnon était, en plus de tout cela, un homme sage et perspicace qui savait trouver les réponses aux questions les plus épineuses. Un cas célèbre dans l'histoire de l'islam illustre, on ne peut mieux, cette capacité.

 

C'était lors de la fameuse réunion de la Saqîfa des Banû Sâ'ida qui vit les Ansârs et les Mûhajirîn se réunir après la mort du Prophète pour élire un calife. Ce jour-là, Usayd eut une attitude très sage qui mit un terme définitif aux divergences sur la nomination d'un successeur temporel au Messager de Dieu . Avec sa dignité de chef des Ansârs, il se leva et dit à ses compatriotes

« Ô Ansârs, vous savez bien que le Messager de Dieu était un émigré. Quant à nous, nous étions les Ansârs du Messager de Dieu et nous serons les Ansârs de son calife. »
 

Ces paroles sages et convaincantes dites, de surcroît, par un homme de la stature de Usayd , tranchèrent définitivement la question du califat et soudèrent la cohésion de la communauté.

 Notre pieux compagnon vécut honoré et respecté sous le califat d'Abû Bakr et de 'Umar qui l'entourèrent de beaucoup d'égards.

Et c'est en l'an vingt de l'hégire, sous le califat de 'Umar, qu'il rendit l'âme à Son Seigneur, après avoir tant désiré rejoindre le Messager de Dieu . Ce dernier ne lui a-t-il pas dit :

 

« Patientez jusqu'à ce que vous me retrouviez devant le bassin. »
 

À sa mort, il laissa des dettes estimées à quatre mille dirhams que ses héritiers essayèrent d'éponger en vendant un terrain lui appartenant. En apprenant cela, 'Umar dit :

« Je ne laisserai jamais les enfants de mon frère Usayd à la charge des gens. »
 

Il alla voir les créanciers qui acceptèrent d'acheter la récolte de quatre ans, à raison de mille dirhams par an.

 

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